"Il faut encourager les réseaux de coauteurs internationaux"

Dominique Foray de l'EPFL a étudié le trajet professionnel de 4666 doctorants des deux écoles polytechniques fédérales. Résultat: réaliser son doctorat dans une autre institution augmente la productivité. Interview

(De "Horizons" no 108 mars 2016)​​​

Comment avez-vous procédé?

Avec ma collègue Fabiana Visentin, nous avons tenté d'isoler l'effet du mode de recrutement des doctorants sur leur productivité scientifique entre 2000 et 2008, mesurée par le nombre de publications. Nous voulions déterminer si la productivité d'un doctorant est influencée par le double fait qu'il vienne d'une autre institution et que son superviseur entretient – ou non – des relations de recherche avec celle-ci.

Quel est le résultat?

Que les doctorants recrutés à l'externe sont plus productifs que les internes. Les plus prolifiques viennent d'institutions extérieures qui entretiennent des liens avec leur superviseur, notamment à travers ses coauteurs. Ils sont alors 10% plus productifs que les étudiants issus d'une université totalement hors du réseau du professeur, et 16% de plus que les étudiants locaux qui sont restés au même endroit pour effectuer leur doctorat.

Comment l'interprétez-vous?

Cela montre le rôle des relations sociales et professionnelles, notamment pour recruter un bon doctorant, une tâche souvent difficile. Le réseau d'un professeur peut l'aider à sélectionner les candidats de qualité.

Des recommandations pour les hautes écoles?

Nos résultats offrent un éclairage intéressant pour les institutions telles que l'EPFL qui mènent un marketing global pour recruter. C'est bien d'ouvrir les portes et de vérifier deux fois la véracité des diplômes lointains, mais il est aussi important d'encourager les chercheurs de l'institution à développer leurs réseaux de coauteurs, notamment dans les pays de recrutement. Certaines universités américaines suivent cette stratégie: elles engagent des chercheurs chinois non seulement pour leur qualité, mais également pour les réseaux qu'ils possèdent dans leur pays d'origine. Ces derniers peuvent s'avérer utiles le jour où l'on recrute de nouveaux doctorants.