Recherche clinique: les patients et le public ont leur mot à dire

Pour la première fois, le FNS a impliqué des représentant∙e∙s des patients et du public dans la sélection des études cliniques soutenues. Un succès.

Répondre à des questions médicales importantes pour la société mais non prioritaires pour l’industrie: tel est l’objectif du programme IICT (Investigator Initiated Clinical Trials) du Fonds national suisse (FNS). Pour la première fois, des représentant∙e∙s des patients et du public ont participé au processus d’évaluation des requêtes. «Nous encourageons la recherche orientée patients et sommes à l’origine de la plateforme nationale de coopération en la matière, la SCTO, avec laquelle nous collaborons étroitement», relève Deborah Studer, responsable du programme IICT. «Associer les patients, qui sont les premiers concernés, à la sélection des projets soutenus constitue donc une avancée logique.»

À la suite d’un appel à candidatures fin 2020, le FNS a retenu quatre représentant∙e∙s, toutes et tous au bénéfice d’une longue expérience dans la défense ou la communication des intérêts des patients ainsi que dans le dialogue entre la société et la recherche:

  • Larisa Aragon Castro, 48 ans, vice-présidente du Project Management Institute Switzerland, membre du conseil d’administration de l’European Patients’ Academy on Therapeutic Innovation (EUPATI) Switzerland
  • Chantal Britt, 52 ans, chargée de communication au Centre de compétence suisse 3R, fondatrice et présidente de l’association Long Covid Suisse
  • David Haerry, 60 ans, secrétaire général de la Swiss Academic Foundation for Education in Infectious Diseases (SAFE-ID), fondateur et président du Conseil Positif Suisse (comité de défense des intérêts des personnes atteintes du VIH)
  • Olivier Menzel, 46 ans, responsable des partenariats stratégiques au Health 2030 Genome Center, fondateur et président de la Fondation BLACKSWAN (fondation pour la recherche sur les maladies orphelines)

Des patients experts

Le rôle de ces représentant∙e∙s au sein du panel d’évaluation international, aux côtés des cliniciens et biostatisticiens? Déterminer si les projets soumis prennent en compte les besoins des patients de manière appropriée. «Trop souvent encore, les patients sont considérés comme des objets. Nous leur donnons une voix et un vote», indique Larisa Aragon Castro. David Haerry abonde: «Le public et les patients ont des attentes parfois différentes de celles des scientifiques, ils ont donc une grande contribution à amener pour garantir la pertinence de la recherche. Parmi les requêtes, les projets scientifiquement excellents étaient d’ailleurs généralement très bons aussi au niveau de l’implication des patients.»

Expérience faite à l’étranger, l’implication des patients et du public améliore en effet la qualité et la pertinence des études réalisées. Ce pilote, avec lequel le FNS souhaite rattraper le retard de la Suisse en la matière et favoriser le dialogue entre science et société, constitue un réel succès. «Le point de vue des quatre représentants a été un parfait complément à celui des cliniciens et des biostatisticiens, se réjouit Matthias Peter, président de la Division Biologie et médecine du Conseil de la recherche, qui a dirigé la séance d’évaluation. J’ai été impressionné par leurs connaissances des recherches en cours dans le monde et par leur niveau de préparation sur leurs dossiers.» Un jugement qui n’étonne pas Olivier Menzel: «Les patients sont de plus en plus engagés et deviennent des experts de leur propre maladie, en particulier dans le domaine des maladies rares. Cela me fascine de voir les idées qu’ils amènent et les initiatives qu’ils mettent sur pied.»

Un pilote à renouveler

L’implication des patients et du public présente un autre avantage: elle incite davantage de volontaires à participer aux études, augmentant les chances de celles-ci d’aboutir. «Les organisations de patients possèdent d’excellents réseaux et peuvent donc contribuer au recrutement, souligne Matthias Peter. Elles ont aussi un rôle à jouer dans la communication des résultats des recherches directement auprès des personnes concernées.»

«Loin d’être une tracasserie, la collaboration entre patients et chercheurs est un investissement, estime Chantal Britt. Elle garantit que les fonds publics sont utilisés à bon escient et que les recherches répondent à de réels besoins.» Au vu du succès de ce pilote, le FNS va poursuivre la collaboration avec les quatre représentant∙e∙s dans le cadre du programme IICT. De plus, il va évaluer la possibilité d’étendre la participation du public à d’autres instruments d’encouragement du FNS.

Sept nouvelles études cliniques approuvées

L’appel d’offres IICT de 2020 a débouché sur 34 requêtes, dont 31 remplissaient les conditions pour être évaluées. Sept projets ont été retenus par le FNS, pour un financement total de 12,5 mios de francs.

Guido Beldi, Hôpital Universitaire de Berne

Un protocole de communication pour favoriser l’échange d'informations pendant la procédure chirurgicale et diminuer le risque de mortalité des patient∙e∙s

Noémie Boillat Blanco, CHUV

Diminuer la prescription d’antibiotiques chez les patient∙e∙s se présentant aux urgences avec une suspicion de pneumonie sans aggraver leur état

Annemarie Hübers, Hôpitaux Universitaires de Genève

Tester un nouveau médicament pour la sclérose latérale amyotrophique (maladie neurodégénérative des motoneurones de l’adulte)

Rahel Naef Brand, Université de Zurich

Un nouveau programme visant à améliorer la communication et le soutien aux membres de la famille des personnes gravement malades traitées en soins intensifs

Marios-Nikos Psychogios, Hôpital Universitaire de Bâle

Tester l’effet de la thrombectomie mécanique en cas d’AVC sur le degré d’incapacité dans les activités quotidiennes

Hans-Georg Wirsching, Hôpital Universitaire de Zurich

Explorer l’efficacité d’un traitement combiné en tant que complément à la chimiothérapie standard dans le traitement du glioblastome (tumeur du cerveau) afin d’améliorer les chances de survie des patient∙e∙s

Patrick Wüthrich, Hôpital Universitaire de Berne

Une préparation physique et diététique pour des chirurgies majeures chez les patient∙e∙s âgé∙e∙s fragiles afin de réduire les complications